Les Franco-Ontariens et les luttes scolaires: La crise du Règlement XVII*
Ligne du temps du système scolaire francophone
Établissement du système scolaire public de l'Ontario. Durant cette période, les francophones disposent d'école bilingues ou de langue française. En 1855, le surintendant de l'éducation pour l'Ontario (Canada-Ouest) Egerton Ryerson intervient dans un différend entre les commissaires d'une école de Charlottenburg. Il déclare que le français est une langue officielle au pays et que les commissaires peuvent permettre l'enseignement du français et de l'anglais dans leurs écoles selon le désir des parents. En fait, le réseau des écoles françaises du Canada-Ouest se développe au rythme de l'établissement des francophones sur le territoire.
L'Acte de l'Amérique du Nord Britannique (AANB) créant formellement le "Dominion du Canada." L'article 93 de l'AANB donne le pouvoir législatif en matière d'éducation aux provinces et garantie aux minorités catholique et protestante d'une province un droit d'éducation public. Aucun droit n'est défini en matière de minorités linguistiques en éducation.
Adoption par le gouvernement ontarien de Oliver Mowat d'une loi décrétant que l'anglais doit être la langue de communication dans toutes les écoles de l'Ontario. Le ministère de l'Éducation de l'Ontario retire graduellement tous les manuels français de sa liste de manuels autorisés. Le gouvernement ontarien espère alors que les Franco-Ontariens vont choisir volontairement l'assimilation.
L'Association canadienne-française d'éducation d'Ontario (ACFEO) est fondée dans le but de veiller aux intérêts en éducation des Franco-Ontariens face à la menace d'assimilation grandissante. Création de la Commission Merchant, inspecteur en chef des écoles, sur la question des écoles francophones en Ontario.
Discours prononcé par Mgr Michael Fallon à la retraite ecclésiastique du 14 juillet 1910, à Sandwich, Ontario.
Suite au Rapport Merchant, le gouvernement ontarien de James Whitney adopte une mesure visant à restreindre l'usage du français et à faire de l'anglais la principale langue d'enseignement dans les écoles élémentaires fréquentées par les élèves franco-ontariens. Le Règlement XVII limite l'enseignement du français et son usage comme langue de communication aux deux premières années du primaire.
Le Conseil des écoles séparées d'Ottawa (CESO) avec Samuel Genest à sa tête donne le ton à la résistance en donnant pour consigne à ses enseignants de continuer à enseigner en français comme avant. La plupart des commissions scolaires bilingues de la province décident de suite l'exemple.
Afin de contrer la résistance franco-ontarienne, le ministère de l'Éducation de l'Ontario réplique octobre 1912 en publiant le Règlement XVIII qui menace de représailles les commissions scolaires, les enseignants et même les élèves qui s'opposent au Règlement XVII.
Une injonction de la Cour paralyse la CESO pour avoir défié le Règlement XVII. La CESO n'a plus de pouvoir d'emprunt et ne peut plus payer ses enseignants. En septembre 1914, les écoles restent fermées pendant plusieurs jours. Puis, le 16 septembre 1914, Samuel Genest ouvre les écoles en demandant aux enseignants laïcs et religieux d'enseigner malgré le risque de ne pas recevoir de salaire.
En octobre 1914, le directeur du journal Le Devoir, Henri Bourassa, envoie une lettre d'appui aux leaders franco-ontariens.
Le gouvernement ontarien nomme une nouvelle commission des écoles séparées d'Ottawa pour remplacer les commissaires élus de la CESO. Pendant l'été 1915, la « Petite Commission », composée de Denis Murphy, D'Arcy McGee et Arthur Charbonneau, tentent de trouver de nouveaux enseignants pour deux classes de l'école Guigues. Or, Samuel Genest avait déjà embauché Diane et Béatrice Desloges pour ces classes. À la rentrée scolaire, les demoiselles Desloges se présentent en classe, accompagnées par de nombreux parents.
Le secrétaire de la « Petite Commission » vient offrir un salaire aux demoiselles Desloges à la condition qu'elles se soumettent au Règlement XVII. Elles refusent. Elles reçoivent alors des menaces d'emprisonnement et on leur demande de quitter l'école Guigues.
Face au refus de se soumettre au Règlement XVII, le ministère de l'Éducation envoie une lettre révocant le certificat d'enseignement de Béatrice Desloges.
Les parents et les élèves réagissent aux actions du gouvernements ontariens et de la « Petite Commission » lors de manifestations publiques à Ottawa. Dans les semaines qui suivent, les dix-sept écoles de la CESO ferment leurs portes. Dès lors, les 4 300 élèves francophones de la CESO font la grève.
Le Conseil privé de Londres déclare la « Petite Commission » illégale. La CESO peut reprendre ses activités normalement. Samuel Genest décide de payer les salaires en retard que la CESO doit à ses enseignants. Cependant, des contribuables anglophones intentent une poursuite judiciaire contre Genest afin de le faire emprisonner. Mais l'intervention du pape Benoît XV, qui défend aux catholiques de l'Ontario de se poursuivre entre eux pour des questions de langue, met un terme aux procédures judiciaires
Ouverture d'une école privée complètement indépendante à Pembroke (École Jeanne D'Arc). Le conseil d'école embauche Jeanne Lajoie comme enseignante, sans salaire.
Ouverture d'une école de pédagogie à l'Université d'Ottawa pour les futurs enseignants francophones. L'école de pédagogie sera remplacée par la Faculté d'éducation de l'Université d'Ottawa en 1965.
Le premier ministre ontarien Howard Ferguson accepte de créer une nouvelle commission d'enquête (commission Scott-Merchant-Côté) afin de trouver une solution à la crise scolaire en Ontario.
Dépôt du rapport de la commission Scott-Merchant-Côté. Le gouvernement ontarien établit un système d'écoles primaires bilingues où le français devient la principale langue d'enseignement. Il nomme également Amédée Bénéteau et William John Karr directeurs respectivement de l'enseignement du français et de l'enseignement de l'anglais. Six inspecteurs franco-ontariens sont dorénavant en charge des écoles primaires franco-ontariennes.
Publication par le ministère de l'Éducation du programme d'études pour les écoles franco-ontariennes. Intitulé "Circulaire 46", le document spécifie les cours à suivre dans le programme scolaire francophone de l'élémentaire, du secondaire et de l'Université en Ontario.
Établissement de la commission royale d'enquête sur l'éducation en Ontario (commission Hope). La commission compte 21 membres, dont seulement quatre sont catholiques et un seul est franco-ontarien.
Présentation du rapport de la commission Hope. Le rapport reconnaît l'importance d'utiliser le français comme langue d'enseignement pour les élèves francophones à l'élémentaire. Cependant, il soutient que les élèves franco-ontariens devraient maîtriser aussi bien l'anglais que le français à la fin de l'élémentaire et que l'utilisation du français comme langue de communication devrait être limitée aux six premières années. Au secondaire, le français ne devrait être enseigné que comme une langue seconde. L'ACFEO prend immédiatement position contre les recommandations du rapport Hope.
Ouverture d'une école normale pour futurs enseignants à Sudbury. En 1974 l'École normale de Sudbury devient l'École des sciences de l'éducation suite à l'intégration à l'Université Laurentienne.
Création du comité "Bériault" sur les écoles de langue française de l'Ontario. Présentation du Rapport "Hall-Dennis" du comité provincial sur les buts et objectifs de l'éducation dans les écoles de l'Ontario. Le gouvernement ontarien de John Robarts modifie la Loi sur l'administration des écoles (Loi 140) et de la Loi sur les écoles secondaires et les conseils scolaires (Loi 141) permettant la création d'écoles secondaires et de conseils scolaires francophones.
Manifestations de parents et d'élèves francophones pour la création d'une école secondaire de langue française à Sturgeon Falls. Le conseil scolaire de Nipissing refuse ce qui mène à la création d'une commission ministérielle sur l'éducation secondaire de langue française présidée par Thomas H. B. Symons de l'Université Trent. Le rapport final de la commission Symons amène, l'année suivante, le gouvernement ontarien de William Davis à adopter les lois 180 et 181 qui créent la Commission des langues de l'Ontario pour porter en appel les décisions des conseils scolaires défavorables aux minorités linguistiques. Le conseil scolaire de Nipissing approuve finalement la création d'une école après d'intenses négociations.
Crise scolaire à Penetanguishene où la communauté francophone demande une école secondaire de langue française. Face à l'opposition du conseil scolaire du comté de Simcoe, les francophones ouvre une école parallèle "L'école de la Huronie" à l'automne 1979. La crise de Penetanguishene embarrasse William Davis, le Premier ministre de l'Ontario, qui se fait un ardent défenseur du fédéralisme canadien à la veille du Référendum québécois de 1980.
Rapatriement de la Constitution canadienne et adoption de la Charte canadienne des droits et libertés. L'article 23 de la Charte sur le "droit à l'instruction dans la langue de la minorité" reconnait aux francophones le droit à une éducation de langue française partout au pays, là où le nombre le justifie. La Cour supérieure de l'Ontario rend finalement une décision favorable aux francophones de Penetanguishene. La Cour donne un mandat au conseil scolaire du comté de Simcoe de construire une école de langue française distincte pour les francophones. L'école secondaire "Le Caron" ouvre ses portes en 1982.
Adoption de la Loi 109 par le gouvernement ontarien de David Peterson concrétisant la création du Conseil scolaire de langue française d'Ottawa-Carleton.
Adoption de la Loi 104 par le gouvernement ontarien de Mike Harris qui accorde finalement aux Franco-Ontariens la pleine gestion de leurs écoles avec 12 conseils scolaires de langue française pour la province.